Peut- être aurai-je dû plus prêter attention à sa manière très particulière d’observer les choses qui l’entouraient quand il était petit. Il pouvait rester en admiration devant une fleur, regarder avec intérêt les couleurs, les nuages. Tout ce qui se présentait à lui était pour mon fils doté d’intérêt. Plus grand, ses sempiternels pourquoi …Et si ceci et si cela…Moi comme la plupart des mamans pressées, je lui disais, oui chéri maman va t’expliquer mais pas tout de suite nous avons des choses à faire…Je n’ai pas le temps…
Peut- être que justement je n’ai pas suffisamment pris le temps de l’écouter, de le regarder.
Et puis certains signes auraient pu me mettre la puce à l’oreille, comme cette fois ou avec son papa nous étions en courses et nous tentions vaguement de calculer le montant de notre caddie afin de vérifier si nous avions assez de liquide et où une petite voix nous avait dit : ça fait 137 francs, à l’époque, nous étions encore en francs et notre fils était tout petit.
Nous nous étions regardés et nous avions dit ensemble « coup de pot » et puis les itinéraires Il était meilleur que le « tomtom », quand je me perdais, il savait toujours me diriger ; maman a droite tu sais bien à gauche tout cela lui semblait si évident…

Puis la vie a suivi son cours. Et plus il grandissait, plus il se renfermait, prenant de moins en moins la parole n’ayant presque pas de copains.
« Votre enfant à du mal à s’intégrer dans le groupe » voilà la phrase que j’entendais à chaque réunion avec ses maîtresses.
Il a un gros potentiel mais quel feignant !…Il faut que vous coupiez le cordon, il est trop dans vos jupes !
Certes, mon enfant était sensible, fragile, vulnérable, mais je ne comprenais pas le décalage qu’il y avait entre mon fils et son intérêt pour tout à la maison et mon mal, triste, et effacé à l’école.
En CM2 je le sentais m’échapper, plus triste de jour en jour, ne voulant plus aller à l’école, trouvant tous les prétextes pour ne plus se retrouver avec eux …
Les autres, ceux qui n’étaient pas comme lui et qui ne cherchaient surtout pas à le connaître car ces intérêts était bien éloignés de ceux des enfants de son âge, foot et bagarres, n’étaient pas du tout son univers. Lui, c’était …l’histoire, la lecture, et aller à la chapelle de l’école afin de parler a Dieu… « Au moins lui je peux lui parler et lui confier tout ce que j’ai dans le cœur », me disait il.
A la fin du primaire, il était tellement mal, qu’un jour il m’avait dit « je ne suis qu’une merde, je ne vaux rien, je suis débile… »

Nous avons abordé le collège en nous disant que cela irait mieux et le fait est les professeurs avaient abordé notre enfant différemment et surtout l’avaient considéré autrement.
Il allait un peu mieux sans pour cela avoir des résultats scolaires extraordinaires, mais au moins, il était un peu moins mal dans sa peau.
Mais les professeurs étaient unanimes, quel dommage, il n’exploite pas ses possibilités …Voilà le discours qui était devenu habituel pour nous, et, nous nous étions presque résignés, notre enfant était feignant.

Puis j’ai fait la connaissance d’un petit garçon qui était scolarisé avec notre fille.
C’était l’identique du notre et un jour, en parlant avec sa maman, en prenant de ses nouvelles car lui aussi était un enfant très torturé et mal dans sa peau, sa maman me dit, enfin nous savons, il est surdoué. Nous l’avons fait testé et il à un QI très supérieur à la moyenne …
Et pourquoi pas, de toutes les façons je voulais mettre toutes les chances du coté de notre fils et pouvoir l’aider. De plus, au fond de moi, existait un doute.
Depuis longtemps je trouvais qu’il n’était en effet pas comme les autres.
Et puis les choses se sont accélérées.
En effet les tests ont révélé que notre enfant était surdoué, je n’ai été qu’à moitié surprise et les souvenirs ont alors fait surface, confirmant cette nouvelle réalité.

Depuis notre enfant va mieux. Il sait enfin qu’il n’est pas comme il le disait « débile », mais qu’il a une autre façon de fonctionner.
Il reprend peu à peu confiance en lui, et s’autorise de plus en plus à être lui-même, endossant tour à tour la veste du parfait ado, puis restant lui quand il le peut.

Ce qui est important dans cette histoire et ce que nous devons tous retenir, c’est que nos enfants vivent chaque jour auprès de professionnels et de pédagogues. Mais, c’est auprès de leur famille qu’il poussent et se construisent et que le 6ième sens des mamans n’est jamais assez pris en compte.

Nous sommes et devons rester les premiers éducateurs de nos enfants et ne jamais douter de qui ils sont, même si en face de nous nous avons des professionnels qui s’évertuent à nous prouver le contraire.