J‘avais tout pour être heureuse. Un mari et trois beaux enfants, même si la naissance de mon fils a été difficile, tout s’arrangeait bien.
Je prenais un peu de temps pour élever mes enfants, j’avais des projets plein la tête.
Mon père venait de cesser son activité, et de ce fait ma mère aussi, puisque mes parents ont travaillé ensemble « pour le meilleur et pour le pire ».
Et ce soir là, de fin décembre, le téléphone a sonné tard dans la soirée, 22H30…
Mon cœur s’est emballé, je suis restée clouée au sol, paralysée, avec un mauvais pressentiment, mais j’étais loin de penser que le cœur de mon Papa, lui, s’était arrêté à jamais.
Les enfants dormaient. Mon mari a décroché le combiné. C’était mon oncle. Il souhaitait me parler…
Cela fait 20 ans, mais je m’en souviens comme si c’était hier. Je l’entends encore me dire : « Papa a eu une crise cardiaque », je lui ai tout de suite demandé « dans quel hôpital a-t-il été transporté ? » et sa réponse « il n’y a pas d’hôpital ».
Les années ont passé, j’ai gardé ma peine au fond de moi pour pouvoir avec mon frère soutenir Maman.
Par rapport à eux deux, j’ai encore de la chance, je garde une belle image de Papa, avec son beau sourire, eux l’ont vu mourir sous leurs yeux, c’est cette dernière image qui leur reste pour toujours.
La vie a continué, plus du tout comme avant…
Je ne pouvais plus dire Papa et Maman. Un grand vide dans mon cœur.
Ce vide m’a rongée, au sens propre comme au sens figuré. Il y a un peu plus de 9 ans, en prenant ma douche, j’ai senti « une petite boule » sur mon sein droit. Après un premier moment de panique, je me suis dit que ce n’était rien de grave. Ce n’était pas possible d’envisager le pire.
Je n’ai pas voulu consulter tout de suite, parce qu’au fond de moi-même j’avais peur, et j’avais raison. Cette petite boule qui aurait pu être bénigne ne l’était pas.
Il y a eu l’opération, la batterie d’examens, la radiothérapie, la chimiothérapie et la guérison.
Tout cela m’a fait beaucoup réfléchir.
Je n’avais pas réussi à faire le deuil de mon père, jusque là. Je me suis rendue malade et je reste persuadée que je me suis déclenché mon cancer.
Papa me manque toujours autant, il m’accompagne toujours en pensée, mais je ne vis plus dans le passé.
J’ai eu une telle peur en me réveillant après mon opération, que je vis maintenant dans le présent tout en me projetant dans l’avenir.
Cette épreuve m’a fait prendre conscience de la fragilité de l’être humain.
Y-a-t-il un moyen de prévenir cela ? Peut-on réellement dire que le chagrin peut être à l’origine de maladies graves ?
Aujourd’hui encore, je n’ai pas de réponse à apporter, mais j’attends d’autres témoignages comme le mien.
Une Amie de Lucie