Si l’on essaie de mettre en lumière le bon usage des médicaments psychotropes, on est partagé entre deux courants opposés :

Le premier, axé sur l’incroyable progrès de la science – dont il faut retenir au moins deux dates, 1949 la découverte par J.F. Cade du sel de lithium qui a permis de traiter la psychose maniaco-dépressive, ou encore celle de 1952, où la découverte de la chlorpromazine par H.Laborit, considéré comme le premier neuroleptique, a révolutionné le traitement des psychotiques internés. Cette perspective révolutionnaire a porté désormais  l’espoir d’une « guérison » possible pour des sujets souffrant de divers troubles psychiatriques et psychologiques.

Le deuxième courant, qui, lui serait hostile, dénonce une généralisation abusive des médicaments pour traiter tout symptôme psychique, confondant – par exemple - la tristesse résultant d’un deuil normal avec une dépression, ou préconisant la ritaline à tout enfant un peu « agité » qui – soupçonné d’avoir un syndrome hyperactif- répond en réalité à une dépression maternelle, qui est tout de même une réponse symptomatique souhaitable, et qui mérite une écoute attentive. Comme indice de cette tendance il suffit de rappeler que la France à une consommation trois fois plus importante que celle de l’Angleterre et  de l’Allemagne.

Faisons la part des choses entre cet espoir scientifique positiviste des médicaments psychotropes, et une diabolisation de « la drogue » installée insidieusement - notamment à partir des années 80 après les années de gloire 60 - 70, marquées par « un culte à la drogue » récréative considérée comme un moyen d’évasion.

Il est indéniable que l’introduction des psychotropes a modifié à tout jamais l’offre thérapeutique aux sujets en souffrance, allant jusqu’à altérer la « carte » nosographique des maladies psychiatriques. Nous en sommes reconnaissants, car bien employé – c'est-à-dire après un diagnostic différentiel et sur un temps limité, soumis à un contrôle périodique pour éviter l’accoutumance -,  l’usage des psychotropes s’avère un outil précieux pour soulager une souffrance insupportable qui peut conduire un sujet à des passages à l’acte sévères. Le sujet peut s’en servir comme d’une « béquille » le temps de la convalescence pour l’aider à « se remettre à marcher sur ses deux jambes » à nouveau. Mais personne ne souhaiterait devenir l’otage d’une dépendance médicamenteuse – qui n’est pas très loin d’une toxicomanie « légalisée ». Un traitement médicamenteux ne pourra jamais remplacer les bienfaits liés aux changements durables obtenus au moyen d’une psychothérapie. Les deux sont subsidiaires, et sont complémentaires dans la démarche qui doit conduire à alléger la souffrance. Nul n’oserait songer à les considérer comme antagonistes, car selon le sujet, le type de trouble, le degré de mal-être, leur conjonction s’avère un véritable atout pour redonner une dignité au sujet dans la maladie, pouvant à terme l’en délivrer de son poids.

 

Autres données bouleversantes (source wikipedia)

Durant l'année 1997, 12 % des français âgés de plus de 15 ans ont consommé un ou plusieurs psychotropes dont 7,9 % un anxiolytique, 4,7 % un hypnotique, 3,6 % un antidépresseur et 1,5 % un neuroleptique. Cette proportion de consommateurs de psychotropes croît avec l'âge : après 50 ans pour les femmes et après 60 ans pour les hommes, plus d'une personne sur six a consommé un ou plusieurs psychotropes.
Trop de Français, en particulier après 60 ans, sont traités trop longtemps par des psychotropes : 11 % des Français sont des consommateurs réguliers de psychotropes (au moins une fois par semaine et depuis au moins six mois), 29 % des femmes entre 60 et 69 ans, plus de 34 % des femmes âgées de plus de 80 ans).
Une inadéquation de l'utilisation des antidépresseurs en ville dans un nombre de cas inacceptable. Plus du tiers des antidépresseurs sont prescrits en dehors des indications de l'autorisation de mise sur le marché : environ 20 % des prescriptions ne reposent sur aucun diagnostic psychiatrique étayé.
Des prescriptions souvent fondées sur l'existence d'une plainte mono symptomatique : par exemple la tristesse qui est assimilée à une dépression.
De nombreuses prescriptions sont reconduites en l'absence de symptômes. La durée de prescription des antidépresseurs excède un an dans plus de la moitié des cas, contrairement aux recommandations en vigueur.
Les Co prescriptions, notamment entre antidépresseurs et anxiolytiques ou entre anxiolytiques et hypnotiques sont fréquentes mais rarement justifiées au long cours.