Le stress au travail est certainement un phénomène ancien. Toutefois la souffrance est aujourd’hui plus couramment exprimée et il est devenu une préoccupation majeure pour les préventeurs et les acteurs de santé.
1. Le stress au travail : un facteur de risque.
D’après les statistiques, 15% des arrêts de travail concernent des problèmes psychosociaux. Les consultations des centres de pathologies professionnelles pour ce motif ont été multipliées par 4 entre 2001 et 2006. Selon la quatrième enquête 2005 de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, 22,3 % des salariés européens souffrent de problèmes de santé liés au stress d’origine professionnelle. Concernant la santé mentale, une situation stressante prolongée peut être à l’origine de dépressions voire de suicides. Le stress chronique est maintenant reconnu comme facteur de risque pour diverses pathologies en particulier cardiovasculaires, digestives mais aussi les dorsalgies. Des études évoquent aussi un risque accru de maladies auto-immunes (asthme, polyarthrite rhumatoïde), de désordres hormonaux (dysthyroidies) et de risque pour la grossesse (prématurité).
2. Les facteurs de risque de stress au travail :
D’après la Définition du Petit Larousse : Le mot stress vient du latin « stringere », signifiant, tendu de façon raide. Au 18ème siècle, en Angleterre, stress signifie un état de détresse physique et psychique en rapport avec l’oppression ou la dureté de la vie, les privations, l’adversité. Par la suite, on entend stress plutôt comme une force, une pression, une forte influence agissant sur un objet physique ou une personne, c’est à dire sur le plan physique ou physiologique.
Pour l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, Le stress survient lorsqu’il y a un déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes imposées par son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face.
Dans l’environnement professionnel, il peut être du à différentes contraintes : celles inhérentes au métier (confrontation avec la mort, urgences..), celles liées à l’évolution des techniques ou des outils de travail, celles liées à l’intensification du travail (charge de travail, délais à respecter…) et enfin les difficultés relationnelles. Ces causes peuvent instaurer un climat de pressions qui ne doit toutefois pas être systématiquement confondu avec le processus de harcèlement.
3. Quelle prévention ?
Le législateur impose actuellement à l’employeur d’évaluer les risques psychosociaux dans son entreprise et de proposer des solutions de prévention. Cette évaluation doit se faire par le biais du Document Unique d’évaluation des risques professionnels. Le chef d’entreprise devient donc responsable de la santé mentale des salariés en rapport avec les conditions de travail dans son entreprise. Par ailleurs, le harcèlement moral dans l’entreprise, si il a été reconnu comme tel par les instances juridiques est interdit par le code du travail et passible de peines d’emprisonnement et d’une amende par le code pénal.
La prise en charge médicale par le médecin du travail du salarié présentant un état de souffrance consiste en une évaluation des conséquences somatiques du stress et du niveau du retentissement sur sa santé mentale en particulier. Le médecin du travail orientera le salarié vers son médecin traitant ou directement vers le spécialiste pour un soutien et une prise en charge psychologique selon les cas. Il peut aussi orienter le salarié vers une consultation « souffrance au travail » de pathologie professionnelle. En parallèle, et avec l’accord du salarié, le médecin du travail peut intervenir auprès de l’entreprise pour essayer de déterminer les causes de son malaise et essayer de proposer des solutions pour y remédier. Dans le cas de difficultés relationnelles, l’intervention du médecin auprès de l’entreprise permet parfois de désamorcer des conflits. Plus on arrive à intervenir tôt, tant sur le plan médical que sur le plan professionnel, plus on arrivera à éviter l’escalade qui rend ensuite les choses irréversibles. C’est pour cette raison qu’il est souhaitable que le salarié se manifeste de façon précoce auprès du médecin du travail en demandant une visite médicale. Par ailleurs, si le médecin traitant est au courant d’une situation de stress au travail, il est souhaitable qu’il en informe le médecin du travail, avec l’accord du salarié. De même, si le salarié est en arrêt de travail pour ce motif, il est utile d’organiser une visite de préreprise, pendant l’arrêt de travail, avec le médecin du travail (visite demandée par le médecin traitant ou le médecin conseil de la sécurité sociale ou le salarié lui-même).
GLOSSAIRE :
Harcèlement moral :
La psychiatre Marie France Hirigoyen définit le harcèlement moral comme : « toute conduite abusive qui se manifeste notamment par des comportements, des paroles, des actes, des gestes, des écrits, pouvant porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l'intégrité physique ou psychologique d'une personne, mettant en péril l'emploi de celle-ci ou dégradant le climat social. »
Le harcèlement est défini dans le Code du travail (Article L 122-49) « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ». Il est aussi défini dans le Code pénal (Article L 222-33) « Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »
Dépression :
Le terme dépression du latin depressio, "enfoncement" désigne une maladie pour certains, ou un syndrome pour d'autres, dont la manifestation centrale est un état mental caractérisé par une lassitude importante, une dépréciation de soi, un pessimisme qui entraînent des perturbations importantes dans les rapports psycho-affectifs et des troubles somatiques (troubles du sommeil, de l’appetit...)
C'est une maladie mentale caractérisée par une modification profonde de l'état thymique, de l'humeur dans le sens de la tristesse, de la souffrance morale et du ralentissement psychomoteur. La dépression s'accompagne généralement d'anxiété, et entretient chez le patient une impression douloureuse d'impuissance, de fatalité désespérante, de ruminations à thème de culpabilité, d'indignité, d'auto dépréciation...
Burn out (ou syndrome d’épuisement professionnel) :
Ce terme s’applique spécifiquement aux professionnels de la relation d’aide (policiers, sauveteurs, métiers sociaux) et aux soignants. L’épuisement ou l’usure professionnelle entraînent un syndrome psychologique à trois dimensions : l’épuisement émotionnel (sentiment de fatigue), la dépersonnalisation (insensibilité et réactions impersonnelles vis à vis des usagers) et diminution de l’estime de soi avec installation d’un sentiment d’incompétence.
Constance Eliçabe Broca - Psychologue-Psychanalyste
Ariane Le Louët - médecin du travail
Williams Josse - médecin prévention