De plus en plus de personne dépendantes sont motivées à se sevrer et demandent un traitement. Mais l’addiction est une affection complexe impliquant des modifications biologiques dans le cerveau aussi bien que de nombreux problèmes psychologiques, sociaux, familiaux, ainsi que des aspects liés à l’environnement.
En conséquence, un traitement cohérent de l’addiction doit s’attaquer à cette multitude de facteurs et répondre spécifiquement aux problèmes médicaux, biologiques, psychologiques et sociaux.
Les psychothérapies et les interventions comportementales
De nombreux traitements comportementaux ont démontré leur efficacité pour réduire l’addiction que ce soit sur le plan résidentiel ou ambulatoire. Il faut dire que faute d’une médication spécifique, ces traitements représentent aujourd’hui la seule solution existante présentant certains résultats.
L’efficacité de diverses psychothérapies a été étudiée aux Etats-Unis. Le NIDA a supervisé une recherche mesurant l’efficacité de quatre types de traitement dans cinq centres portant sur plusieurs centaines de patients : un groupe de conseils seul, un groupe de conseils associé avec un soutien individuel, un groupe de conseils associé avec une thérapie cognitivo-comportementale et un groupe de conseils associé à une thérapie de « soutien de l’expression » (supportive expressive psychotherapy).
Les groupes de conseils comportent une première période de trois mois durant laquelle les patients sont bien informés des bases neurobiologiques de l’addiction, des mécanismes de la rechute et des différents moyens de faciliter l’abstinence. Une seconde phase de trois mois privilégie la libre discussion entre les membres du groupe centrée sur l’aide et les conseils que chacun peut apporter aux autres par rapport aux problèmes rencontrés. Le soutien individuel consiste à aider les patients à parvenir à une abstinence et surtout à la maintenir durablement par un changement de comportement tel que l’évitement des situations déclenchant les pulsions. Le groupe de conseils et le soutien individuel insistent aussi sur l’entraide et encouragent les patients à participer à des groupes tels que les groupes anonymes en 12 étapes en dehors des séances de thérapies en cours. La thérapie cognitivo-comportementale consiste à identifier les facteurs présumés en relation avec l’addiction d’un patient et d’évaluer avec ce dernier les avantages et désavantages de ces facteurs. Les thérapeutes utilisent aussi les jeux de rôle, l’entraînement comportemental pour apprendre à contrôler des situations d’excitation et participent avec les patients à des activités planifiées contrôlées. La thérapie de « soutien de l’expression » consiste à identifier les conflits interpersonnels en relation avec l’addiction d’un patient. Les thérapeutes aident les patients à comprendre le rôle que jouent ces conflits dans leurs comportements addictifs et les problèmes qu’ils engendrent dans le cadre du sevrage.
Les meilleurs résultats ont été obtenus par le groupe de conseils combiné avec un soutien individuel.
Comparaison de l’efficacité de la thérapie cognitivo-comportementale et du programme dit des douze étapes
La thérapie cognitivo-comportementale part du principe que notre environnement influence profondément notre façon de penser et de notre comportement. Les thérapeutes enseignent donc à leurs patients de nouvelles façons d’agir et de penser en réponse aux problèmes de l’environnement. En particulier, l’évitement des situations d’excitation et l’apprentissage du refus d’utiliser leur comportement addictif pour régler un problème.
La méthode des douze étapes, utilisée par les groupes d’auto-support anonymes issus des Alcooliques Anonymes, se base sur la camaraderie et l’entraide mutuelle centrée sur des groupes de rencontres réguliers. Le but est la guérison par l’abstinence durable, acquise en respectant progressivement douze principes, les douze étapes. Sans être affiliée à un mouvement religieux, la méthode des douze étapes comporte une composante spirituelle caractérisée par une croyance en une sorte de « puissance supérieure » qui aide les membres à parvenir à l’abstinence puis à la maintenir.
Une étude a démontré que, de façon générale, les sujets ayant bénéficié de la thérapie cognitivo-comportementale ont été plus nombreux à rester abstinents dans le mois qui a suivi l’évaluation que leurs camarades dans le groupe des douze étapes.
La thérapie de la récompense (ou Management des contingences) reste à essayer sur les addicts comportementaux notamment lorsque nous aurons trouvé un moyen de prouver leur abstinence.
Une thérapie comportementale qui a démontré des succès notables chez bien des addicts notamment à la cocaïne se base sur le principe de la récompense. Le but est de retenir les patients en traitement et de les amener à l’abstinence durable en les motivant par des bons cadeaux.
En fonction de l’abstinence de la cocaïne prouvée par des analyses d’urine régulières (malheureusement inutiles dans le cas d’addiction comportementales), les patients gagnent des points qui peuvent être échangés contre des bons pour d’autres plaisirs plus sains comme des livres, des entrées dans un fitness, un cinéma ou un restaurant. Plusieurs études démontrent des résultats nettement meilleurs pour cette thérapie comportementale comparée à d’autres approches. Ce type de thérapie reste à essayer sur les addicts comportementaux notamment lorsque nous aurons trouvé un moyen indéfectible de prouver leur abstinence.
Traitement en institution résidentielle
Les communautés thérapeutiques ou les programmes résidentiels d’une durée d’un minimum de six à douze mois offrent une prise en charge soutenue à l’abri des excitations du milieu des produits psychoactifs et sont particulièrement indiquées pour les patients incapables de rester abstinents aux produits souvent cause ou effet d’un comportement addictif, malgré plusieurs traitements ambulatoires souvent en raison de graves problèmes psychosociaux liés à une comorbidité psychiatrique.
Sachant que les symptômes de sevrage tels que les difficultés de sommeil, l’anxiété, les troubles de l’humeur et surtout l’anhédonie (absence de plaisir) peuvent durer de une à dix semaines et que des épisodes de craving peuvent persister durant des mois, on comprend mieux l’intérêt d’une telle prise en charge résidentielle pour des patients fragiles psychologiquement et sensibles au stress.
Les traitements pharmacologiques
Malheureusement, à l’heure actuelle, aucun médicament spécifique vraiment efficace n’existe pour traiter la dépendance comportementale. C’est pourquoi les équipes de chercheurs poursuivent d’intenses recherches pour mettre au point de nouvelles molécules sûres et efficaces.
Le syndrome de sevrage d’une addiction comportementale et son traitement
Contrairement à ce qui a été longtemps prétendu, il existe bel et bien un syndrome de sevrage de l’addiction comportementale très différent cependant de celui des produits psychoactifs. Classiquement, il a toujours été dit que l’arrêt du comportement n’entraînait pas de dépendance physique mais uniquement une dépendance psychique, souvent intense. A la lumière de nos nouvelles connaissances en neurobiologie, nous devons revoir ces définitions car, à l’arrêt des différents comportements, il existe des dérèglements neurobiologiques qui peuvent entraîner des symptômes dont l’expression est plutôt somatique ou plutôt d’ordre psychique et qui entraîne essentiellement de l’anxiété, une dysphorie, de la fatigue, une anhédonie et des dyssomnies. Il peut parfois constituer un véritable syndrome dépressif survenant quelques jours après l’arrêt et pouvant durer plusieurs semaines. Le traitement de ce syndrome de sevrage est relativement facile car souvent les manifestations cliniques sont modérées à faibles. La plupart des sujets sont fatigués pendant quelques jours et récupèrent progressivement par un simple repos, si possible dans un milieu protégé. Dans les cas plus rares de manifestations sévères de dépression avec danger suicidaire, une hospitalisation s’impose dans un centre spécialisé.
Maintien de l’abstinence de la dépendance comportementale
Dans la mesure où la grande majorité des sujets sevrés rechutent dans les semaines ou les mois qui suivent, il est particulièrement important de limiter ce risque par une pharmacothérapie efficace en combinaison avec une approche relationnelle et comportementale. Malheureusement, peu de substances ont démontré une efficacité nettement supérieure comparée à un placebo, sur la base de plusieurs études.
Les antidépresseurs
Plusieurs recherches démontrent l’intérêt de la désipramine qui facilite le maintien de l’abstinence. Cette molécule semble avoir plus d’effet sur le traitement de la dépression que sur la dépendance. Dans la pratique, ces traitements sont difficiles à appliquer et d’autres études ne démontrent pas de tels résultats.
Groupes d’entraide et d’auto-support
Les Dépendants Affectifs et Sexuels Anonymes (DASA), les Outremangeurs Anonymes (OA), et d’autres groupes de soutien et d’auto-support sont des associations de personnes dépendantes qui partagent entre eux leur expérience, leurs forces, leurs difficultés et leurs espoirs dans le but de résoudre des problèmes communs et d’aider les autres participants à se rétablir ou à maintenir leur abstinence de comportement addictif.
Certains départements d’Addictologie récemment créés dans les CHU grâce au Plan Addiction du gouvernement organisent également des groupes de parole thématiques.
Le Coaching addictologique
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