Définition du bruxisme :
Le bruxisme du sommeil intrigue l'homme depuis fort longtemps comme en témoigne la Bible qui décrit ces étranges manifestations nocturnes.
Le bruxisme se définit comme des mouvements masticateurs et des grincements des dents répétitifs et involontaires sans but fonctionnel, fréquemment inconscients, associés à l'usure anormale des dents et à l'inconfort des muscles de la mâchoire. Il faut distinguer le bruxisme survenant à l'éveil (de type réactionnel) de celui survenant lors du sommeil (BS) qui est un désordre du mouvement lors du sommeil selon la classification 2 de l' « International Classification of Sleep Disorder ».
La prévalence du bruxisme :
Le bruxisme du sommeil touche entre 5 à 25 % des enfants et des adultes, dont 14 à 20 % d'enfants de moins de 11 ans, 13 % d'adolescents, 5 à 8 % de sujets adultes et 3 % de plus de 6O ans. Le bruxisme à l'éveil tend à être plus fréquent chez la femme et diminue avec l'âge alors que la prévalence est identique entre les femmes et les hommes pour le BS. Rappelons que près de 60 % de la population générale présente une activité rythmique des muscles masticateurs enregistrée pendant le sommeil.
Les facteurs de risques :
Les principaux FDR responsables du bruxisme sont les facteurs familiaux et génétiques : l'influence génétique est faible et probablement en rapport avec l'influence de facteurs environnementaux selon des études effectuées auprès de jumeaux identiques. A ce jour il n'y a pas de phénotype identifié. Selon les écrits de la moitié du siècle dernier, les facteurs oro-faciaux-morphologiques dont les troubles de l'occlusion, comptaient parmis les FDR prédisposants ; toute fois la littérature actuelle est fortement débattue sur ce point. Des facteurs chimiques interviennent également dans la physiopathologie du bruxisme : ainsi les concentrations des catécholamines urinaires (épinéphrine) sont significativement associées avec la présence de signe du bruxisme, avec l'apparition du bruxisme chez l'enfant et avec la haute activité des muscles masséters pendant le sommeil chez l'adulte. Contrairement aux écrits, le rôle de la dopamine a été moins clairement associé au BS qu'initialement suggéré dans les revues de littérature. De plus, des études de cas sur le rôle de certains médicaments associés à la sérotonine, tels que les antidépresseurs bloquant la recapture sélective de la sérotonine, augmenteraient le BS et le grincement des dents. Pendant le sommeil, 60 % des sujets normaux présentent une activité rythmique des muscles masticateurs. Le bruxisme est diagnostiqué quand cette activité devient trop fréquente et qu'elle s'associe avec des grincements de dents. Le bruxisme pendant le sommeil se caractérise par une activation transitoire du cortex cérébral et une augmentation de la fréquence cardiaque et de l'activité motrice, l'ensemble laissant suggérer une origine centrale.
La clinique :
Pour confirmer le diagnostic clinique, à l'interrogatoire il faut rechercher les signes suivant : les grincements de dents durant le sommeil, le fait d'être conscient de serrer des dents durant l'éveil, l'inconfort des muscles masticateurs ou leur fatigue et l'hypersensitivité des dents. Puis il faut réaliser un examen bucco-facial pour rechercher une usure des dents, laquelle peut avoir eu lieu des années avant la période de grincement actuelle et être causée par plusieurs autres facteurs, et une hypertrophie des muscles masséters. Seuls les 6 % de la population qui présentent un bruxisme exagéré et répétitif vont développer, à moyen ou long terme des pathologies oro-faciales comme une usure dentaire, pouvant être considérée comme un élément caractéristique du bruxisme. Actuellement les manifestations d'abrasion dentaire, associées aux problèmes musculaires, aux problèmes paradontaux et à la modification de la dimension verticale d'occlusion sont analysées et remises en questions. Cependant pour apprécier la gravité ou non du bruxisme, il faut dater le début et évaluer la fréquence des grincements de dents (3 à 5 nuits par semaine sur 3 – 6 mois correspondent à une atteinte modérée à sévère) ; il faut rechercher la présence de lésions dentaires, d'inconfort des muscles masticateurs la journée et ou de leur fatigue, et le serrement volontaire avec des muscles masséters hypertrophiés.
Les moyens diagnostics :
Actuellement l'examen clinique prédomine sur la technique exploratrice en polygraphie. Il demeure toutefois impératif, pour effectuer des essais cliniques, d'objectiver spécifiquement le bruxisme du sommeil avec des outils validés et des critères de scoring des activités motrices reconnues.
Des questionnaires peuvent aider au diagnostic mais sans une grande spécificité. Il existe aussi des enregistrements : ceux-ci peuvent être proposés en ambulatoire dont les enregistrements électromyographiques (p.ex : Bite Strip qui est un outil prometteur présentement à l'essai afin d'en démontrer la spécificité et la validité indépendamment de la firme qui le fabrique) mesurant l'activité musculaire des masticateurs, couplés ou non à l'enregistrement du rythme cardiaque et la mise en place d'une gouttière composée de capteurs de force. Sinon, ils peuvent être réalisés en laboratoire du sommeil avec un enregistrement polygraphique couplé à un enregistrement audio-vidéo qui permettent d'évaluer l'activité musculaire des muscles masticateurs et des jambes associée à un électroencéphalogramme et un enregistrement de la respiration permettant d'éliminer également une apnée du sommeil, un mouvement périodique des jambes, etc...).
Les moyens thérapeutiques :
Si nous nous référons à l'étiologie, il paraît logique, dans un premier temps, de s'orienter vers une solution thérapeutique comportementale ou psychologique par le biais d'une approche basée sur la sophrologie, l'hypnose ou la psychothérapie.
L'utilisation de gouttières occlusales reste un moyen simple et efficace pour limiter au moins l'usure dentaire. Des études récentes suggèrent une diminution du grincement par la mise en bouche de ce type d'appareil mais il faut souligner que les mêmes résultats ont été obtenus avec un appareil témoin recouvrant le palais. Quoiqu'il en soit, le patient consulte en général pour un appareil de protection recouvrant les dents, le dentiste est formé à rendre ce type de traitement. Le clinicien doit être prudent et ne pas prescrire ce type d'appareil à un patient souffrant d'apnées du sommeil, car certaines indications préliminaires suggèrent un risque d'aggraver la condition de cette maladie aux risques élevés pour la santé du patient. Il faut en parallèle supprimer ou diminuer tous les facteurs connus pour favoriser le bruxisme comme le tabac, l'alcool et les psychostimulants et il faut éviter l'exercice intense en fin de journée car ceux-ci semblent exacerber le BS.
L'utilisation de médicaments comme les myorelaxants, les anxiolytiques et les dopaminergiques s'est révélée assez efficace, mais au risque de provoquer des effets indésirables. Ainsi leur utilisation ne peut être que très ponctuelle en cas de phase aiguë et devra en tout cas limitée a quelques jours pour éviter la dépendance.
Bien sûr une approche dentaire pour prévenir et rétablir s'il y a lieu les conséquences de l'usure dentaire.